Mathon Cédric

Psychologue pour adulte
Cédric Mathon, psychologue à Alès

La charge mentale


De quoi parte t-on ?

On doit a Monique Haicault le concept de charge mentale ménagère. Dans son article paru en 1984 La Gestion ordinaire de la vie en deux, cette sociologue conceptualise cet état propre à la femme qui, même en dehors de son domicile (sur son lieu de travail par exemple), va continuer à en penser l’organisation, cumulant de fait, continuellement, la charge liée à son travail et celle liée à l’organisation de la vie de son foyer.

Il y a de ce fait bien plus que cette simple notion de « double journée de travail » : Monique Haicault insiste sur le fait que, cette double charge « travail + foyer » ne se limite pas à une simple addition des contraintes, dans la mesure où la femme pense continuellement, avec une pondération variable, l’organisation de ces deux univers sans pouvoir lâcher prise sur l’un lorsqu’elle s’occupe de l’autre.

Evoquant en 1990 la situation des femmes infirmières, Danièle Kergoat proposera alors le terme de charge mental.

Un problème de femmes ?

Si de nos jours la distribution des tâches ménagères au sein d'u couple a indubitablement évoluée, il n’en demeure pas moins vrai que les femmes conservent encore le fardeau de cette charge mentale.

Celle-ci demeure encore essentiellement une problématique portée par les femmes qui sont toujours, à ce jour, davantage sujettes à s'occuper, notamment par le poids de notre culture, du foyer en plus de devoir dorénavant davantage travailler à l'extérieur.

Les femmes importent donc généralement, d’une manière ou d’une autre, la problématique de la gestion de cette charge mentale au cours de la thérapie de couple.

Pourtant, il s’implique !

Indéniablement, et c’est là une observation tant sociologique que tirée de ma pratique des accompagnements menés en thérapie de couple, le rôle de l’homme évolue.

Nombreux sont ainsi les hommes à revendiquer un rôle plus actif au sein de la vie du foyer. La thérapie de couple laisse ainsi la place aux discours d’hommes se questionnant quant à leur rôle dans la maison ou encore en tant que père, etc. Souvent est-on ainsi amener à voir en thérapie de couple des hommes davantage investis dans la gestion du foyer. Sans pour autant que la charge mentale ressentie par Madame ne diminue.

L'initiative

Pour reprendre l’expression d’une femme accompagnée en thérapie de couple, « le problème de la charge mentale, ce n’est pas tant les tâches à réaliser que la charge en elle-même. »

La difficulté au final ne réside pas tant dans la réalisation des tâches elles-mêmes, mais au sentiment de surcharge que cela peut engendrer… sentiment qui se répercute alors sur notre mental, nos capacités de gestion, et quelquefois les dépasse. Il n’est alors pas rare de retrouver des états de détresse psychologique, de burnout.

Et c’est bien là tout le problème (et la solution) : la répartition des tâches au sein du couple n’est en soi pas suffisante si elle est conçue sous le rapport de la sous-traitance. Au stade où l’homme vient « aider » sa femme. En effet, dans cette optique, celle-ci demeure « propriétaire » de cette tâche. Elle en conserve la responsabilité et l’organisation (voire la supervision de l’exécution et l’évaluation). A ce titre, elle ne peut mentalement s’en décharger totalement.

Imparfaite, cette délégation est toute de même une évolution qui permet tout de même une décharge « physique » des tâches (réalisées physiquement par un tiers) à défaut de l’être également sur le plan mental.

La délégation demeure donc insatisfaisante si elle ne vise pas l’initiative.

Ainsi, en thérapie de couple, il s’agit de faire comprendre que la charge mentale ne peut diminuer que si l’homme assure la gestion intégrale d’une tâche tant dans sa réalisation que dans l’initiative de le faire. Au risque de remettre en cause la place de madame.

De l’art du lâcher prise

La thérapie de couple doit également amener Madame a une certaine forme de renoncement.

Car déléguer rime souvent pour beaucoup (c’est vrai dans le couple comme dans le monde de l’entreprise) avec un sentiment de perte de pouvoir, de perte d’identité. Déléguer, c’est aussi accepter de se voir autrement et de se montrer autrement. Et ce n’est pas si simple. Si culturellement une femme doit encore s’occuper de son foyer, des enfants, quelle femme suis-je si je ne le fais pas, ou du moins, si je le fais moins ?

Pas si simple non plus de déléguer car cela vient très directement remettre en cause des habitudes de fonctionnement (« il couche les enfants trop tard ! ») ou simplement ses propres habitudes (« il n’a pas pris le savon que j’aime »…). C’est aussi faire accepter une part d’imprévue car on ne garde plus le contrôle de toute l’organisation.

C’est enfin apprendre à en parler. Et en la matière la thérapie de couple permet de passer du stade du « je veux » au stade du « j’ai besoin »… amenant le conjoint à agir par rapport à sa compagne et non à ses ordres : l’empathie de votre conjoint sera un puissant moteur pour chercher à l’investir…

Enfin, il convient d’apprendre à valoriser le temps gagner. Bien souvent, en thérapie de couple, les récits de femmes font état de tensions dans cette phase de transition. Madame reste en veille sur les « résultats » obtenus par son conjoint ou ne cesse de craindre le pire en lui accordant la gestion de telle ou telle tâche. Il convient alors d’essayer d’apprendre à valoriser les bénéfices attendus (temps pour soi, à passer avec les enfants,…) plutôt qu’à craindre des conséquences bien souvent très relatives…


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